Israël

    L'impasse du désarmement du Hamas, chronique d'Arié Bensemhoun

    4 minutes
    23 octobre 2025

    ParGabriel Attal

    L'impasse du désarmement du Hamas, chronique d'Arié Bensemhoun
    Le directeur du think tank Elnet France, Arié Bensemhoun

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    Bonjour Rudy, 

    Alors que la première phase du « Plan Trump » a permis un cessez-le-feu dans la bande de Gaza ainsi que la libération des derniers otages israéliens vivants contre celle de milliers de prisonniers palestiniens, un point demeure inextricable pour la suite du processus : l’avenir du Hamas, son désarmement et son exclusion de toute future gouvernance palestinienne.

    Cette exigence de démantèlement, condition indispensable à la fois à la reconstruction de Gaza et à la sécurité d’Israël, reste inacceptable pour le mouvement islamiste, qui continue de violer la trêve par des attaques sporadiques et en refusant de restituer les dépouilles des derniers otages.

    Car le Hamas n’a jamais été un mouvement politique au sens classique du terme. Il ne résulte pas d’un projet d’émancipation nationale, mais d’un acte de guerre sainte — une extension armée des Frères musulmans, portée par la conviction que la violence est la seule voie légitime vers la « libération de la Palestine » du fleuve à la mer et, plus encore, vers la restauration d’un califat islamique mondial.

    Ainsi, les armes ne sont pas un outil, elles sont un credo. 

    Elles incarnent la résistance, l’identité collective, la mission divine. Elles structurent la société gazaouie, façonnent son économie, imprègnent sa culture politique. Chaque roquette, chaque tunnel, chaque uniforme participe d’un récit quasi mystique : celui d’un peuple élu pour combattre les Juifs jusqu’à la fin des temps.

    Renoncer à cet arsenal reviendrait pour le Hamas à se renier lui-même, à rompre le lien vital entre sa légitimité religieuse et sa survie politique. Car son pouvoir ne repose pas sur la représentativité démocratique, mais sur la coercition et la peur.

    Au fil des années, le Hamas s’est mué en un véritable État-mafia. Il contrôle les flux d’aide humanitaire, les importations de carburant, les matériaux de construction. Il taxe chaque transaction à Gaza pour financer ses ambitions génocidaires contre Israël. Les tunnels, présentés comme des instruments de résistance, sont aussi des circuits de contrebande très lucratifs qui enrichissent sa nomenklatura. Et chaque cessez-le-feu, chaque trêve, chaque phase de reconstruction n’est pour lui qu’une pause stratégique — une opportunité de reconstituer son arsenal et de reconsolider sa domination sur le peuple qui l’a élu. 

    Le fusil, c’est le ciment du pouvoir. 

    Le Hamas le sait. Sans armes, il cesse d’être craint ; sans crainte, il cesse d’être obéi. 

    Les armes ne servent donc pas seulement à combattre Israël : elles protègent un système d’exploitation totalitaire. Elles garantissent l’impunité des dirigeants et maintiennent la population sous un régime de terreur, en contrôlant les rues, les mosquées, les écoles, les médias.

    Et cette réalité, nous la voyons chaque jour depuis le cessez-le-feu avec des exécutions publiques et des affrontements avec des clans rivaux cherchant à renverser son autorité.

    Tout le « prestige » du Hamas s’est construit sur la confrontation permanente, sur sa prétention à incarner la seule « résistance authentique » face à un Fatah jugé corrompu et domestiqué par les Accords d’Oslo. 

    Dans cette logique, le désarmement n’est pas une concession, mais une capitulation idéologique. Il signifierait reconnaître la légitimité d’Israël, renoncer à la lutte armée, admettre la faillite de quarante ans de jihad ; et donc se dissoudre dans un processus politique contraire à son ADN.

    Or, les terroristes palestiniens ne pensent pas en termes de victoire ou de défaite militaire, mais en termes de martyre et de continuité spirituelle. Ils s’inscrivent dans une temporalité religieuse où la destruction terrestre n’est qu’une étape vers la victoire spirituelle finale. 

    Le désarmement serait donc pour le Hamas une honte éternelle, un renoncement à la mission sacrée confiée par Dieu. Mieux vaut mourir debout que vivre sans jihad. Alors comment imaginer quelconque compromis sincère avec à un mouvement millénariste pour qui la paix avec les « mécréants » n’est pas un objectif, mais une hérésie ? 

    Tant que le Hamas conservera ses armes, il restera maître de Gaza et du récit de la « résistance ». Mais s’il les perd, il s’effondrera — militairement et spirituellement. 

    C’est cette impasse existentielle qui rend tout processus de paix illusoire, car tant que le Hamas subsiste : il ne peut ni gagner, ni disparaître. Il ne peut qu’entretenir la guerre comme condition de sa survie. Et cette logique rend toute solution durable à Gaza impossible, et donc le retour de la guerre inévitable. 

    Arié Bensemhoun

    ActuJ