Bonjour Arié Bensemhoun, cette semaine, vous souhaitez revenir sur l’actualité des derniers jours concernant les Houthis.
Bonjour,
Dimanche 4 mai, un missile balistique de fabrication iranienne, tiré par les Houthis, a pour la première fois atteint l’enceinte de l’aéroport Ben Gourion, près de Tel-Aviv.
Par chance, l’attaque n’a fait aucune victime. Mais elle a révélé une double faille dans le bouclier aérien israélien : d’abord l’échec du système Arrow, puis celui du missile américain THAAD, qui n’a pas su intercepter la menace.
Un raté certes inquiétant, mais qu’il faut relativiser. Car en près de 600 jours de guerre, et malgré plus de 400 missiles et drones lancés depuis le Yémen, ce n’est que la troisième fois que les Houthis réussissent à franchir un système de défense qui affiche un taux d’interception de 95 %.
En représailles, Tsahal a lancé dès lundi une série de frappes ciblées contre des infrastructures houthies, notamment à Hodeïda, à l’ouest du pays, et à Sanaa, la capitale, où l’aéroport international a été visé.
Mais contre toute attente, mardi soir, le président américain Donald Trump a annoncé avoir conclu, dans le plus grand secret, un cessez-le-feu avec les Houthis. Un accord négocié en coulisses par son envoyé spécial Steve Witkoff, avec l’appui de médiateurs omanais. Des négociations si discrètes… que même Israël n’en avait pas été informé.
Sauf qu’Arié, ce cessez-le-feu ne concerne que les Américains…
C’est effectivement ce qu’il semble à ce stade.
Les Houthis ont accepté de cesser leurs attaques contre le commerce maritime en mer Rouge… en échange de l’arrêt des frappes américaines. Reste à voir si cela évoluera. Mais pour l’instant, Israël se retrouve seul face à des attaques qui, elles, se poursuivent.
Donald Trump, fidèle à son obsession d’obtenir le prix Nobel de la paix – quitte à pactiser avec des entités parasites dont la seule issue devrait être leur disparition –, se désengage d’un front complexe, au moment même où les tensions entre Israël et la milice chiite atteignent un sommet.
Depuis l’entrée en guerre des Houthis en soutien au Hamas, le 8 octobre 2023, Israël comptait sur l’appui américain pour contenir ce front éloigné, afin de se concentrer sur des menaces plus immédiates. Et jusqu’ici, l’administration Trump s’était montrée active : en quatre mois, elle a frappé les Houthis plus durement que pendant l’ensemble du mandat Biden, détruisant environ 60 % de leurs capacités balistiques.
Mais à présent, Israël doit revoir toute sa stratégie face à ce qui reste le dernier grand proxy iranien encore relativement épargné, car difficilement atteignable.
D’autant qu’Arié, les Houthis sont devenus une véritable menace globale…
Absolument.
Nous ne parlons plus ici d’une simple milice yéménite. Les Houthis sont devenus une menace asymétrique, transnationale, et de plus en plus sophistiquée. Leur dangerosité n’est limitée que par leurs capacités militaires — encore modestes, mais en constante progression.
Leur idéologie ne laisse place à aucune ambiguïté. Leur slogan en dit long : « Dieu est le plus grand, Mort à l’Amérique, Mort à Israël, Malédiction sur les Juifs, Victoire à l’Islam ». Ils sont dans une logique de guerre permanente. Et ils ne s’arrêteront que s’ils sont entièrement neutralisés.
Mais il y a plus grave encore. Les Houthis sont aussi devenus un outil stratégique au service des puissances autoritaires anti-occidentales.
Ils sont un rouage central du « croissant chiite élargi » voulu par l’Iran. Mais ils servent également les intérêts du « Quartet du Chaos », en particulier la Chine. Car Pékin, sans jamais s’engager militairement, maximise ses gains économiques en fournissant indirectement des composants critiques pour les drones et missiles houthis, tout en négociant leur libre passage en mer Rouge – là où les navires occidentaux sont pris pour cible.
Et désormais, grâce au cessez-le-feu, l’Iran va pouvoir discrètement réarmer les Houthis, tout en donnant l’illusion d’un apaisement, au moment même où les discussions sur le nucléaire battent leur plein. En réalité, comme pour le Hezbollah, il ne s’agit que d’une pause tactique, et qui pourrait durer jusqu’au départ de Donald Trump si nécessaire.
Alors Arié, que faudrait-il faire ?
Face aux Houthis, il faut une doctrine offensive, claire et coordonnée.
N’oublions pas qu’en 2015, la coalition sunnite, menée par l’Arabie saoudite, s’est cassée les dents sur ce même ennemi.
Il est grand temps que la communauté internationale reconnaisse pleinement le danger qu’ils représentent et leur capacité de nuisance. Ils disposent d’un sanctuaire territorial, d’un soutien logistique structuré, et d’une idéologie profondément anti-occidentale.
Israël ne peut pas se débarrasser seul de cette menace. Il faut une stratégie multilatérale contre un ennemi qui concerne tout le monde.
Car face aux Houthis, plus encore qu’avec le Hamas ou le Hezbollah, la paix ne viendra que par la force. Il ne s’agit plus de contenir une menace locale. Il s’agit désormais d’éradiquer une menace mondiale, encore aujourd’hui alimentée par la naïveté et l’inaction occidentale.
Arié Bensemhoun